La chasse aux décharges sauvages est ouverte





L'équivalent de 8,7 tours Eiffel (88 000 t) d'immondices est négligemment jeté chaque année en France, au bord de nos routes, dans nos rivières ou nos forêts. Avec les beaux jours, ce sont aussi les dépôts sauvages qui reviennent. Et du coup, les collectivités multiplient les initiatives plus ou moins légales pour stopper l'encombrant problème des dépôts sauvages : à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), des affiches rappellent en ce moment que vider ses poubelles en pleine rue est un délit qui peut coûter jusqu'à 3 000 € d'amende.


Plus au Sud, la Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature (Frapna) invite les promeneurs vigilants à dénoncer les indélicats…

Certaines villes sont plus exposées que d'autres à ce phénomène. « Les territoires les moins favorisés sont aussi ceux où l'on jette le plus en pleine rue, décrypte Carole Carpentier, la secrétaire générale de l'ONG Vacances propres. Comme un moyen d'exprimer sa colère, en transformant son quartier en dépotoir. »



Plusieurs communes ont recours maintenant à la technique du retour à l'envoyeur, en identifiant les auteurs des dépôts illégaux et en renvoyant leurs déchets à leur domicile.

L’EXEMPLE. la méthode musclée de Laigneville.
 






Ce que dit la loi

Les dépôts sauvages de déchets sont interdits par la loi et punis par l'article R. 632-1 du Code pénal d'une amende de 35 €. Selon l'article L. 541-46 du Code de l'environnement, pour une entreprise, laisser des monceaux de déchets en camionnette dans un champ ou en forêt peut coûter jusqu'à 75 000 € et jusqu'à deux ans de prison. Par ailleurs, selon un arrêt du Conseil d'Etat de 1977 contre la commune de Merfy (Marne), c'est au maire d'enlever ou de faire enlever les dépôts sauvages dans sa ville. Son inaction est considérée comme une faute lourde et peut engager la responsabilité de la commune.

 


Responsabilité et pédagogie

Flore Berlingen de l'association Zero Waste, rappelle que « les élus s'en préoccupent aussi parce que ce fléau coûte des dizaines de milliers d'euros à chaque commune et donc aux contribuables ».

Sans compter que, face aux tas d'ordures, les maires se retrouvent dans une situation intenable : « Ils sont responsables juridiquement, alors qu'il est très difficile de faire payer le pollueur sauf à le prendre en flagrant délit », souligne Olivier Guichardaz, le rédacteur en chef du journal « Déchets info ». Depuis un arrêt de la cour administrative d'appel de Paris de 2006, il ne suffit pas de trouver au milieu des débris un document identifiant le propriétaire pour l'incriminer. Une épave de voiture rouillée en plein champs par exemple pourrait très bien avoir été abandonnée par n'importe qui. Alors, dès qu'apparaissent ferrailles, bidons vides ou vieux cartons, les municipalités débarrassent les immondices fissa.

Les particuliers qui déposent chaise à trois jambes ou vieux pneus sur un coin de trottoir ne sont pas toujours conscients qu'ils commettent un délit. Alors il faut aussi faire un effort de pédagogie. « Comptons sur l'intelligence des citoyens, encourage Flore Berlingen. Par exemple avec des ramassages collectifs qui permettent de nettoyer nos paysages et de mobiliser sur l'absurde quantité de déchets que nous produisons ! »

Chez Vacances propres, l'objectif est d'embarrasser les jeteurs : « Plus personne n'oserait aujourd'hui cracher dans un café, alors que la pratique était fréquente il y a moins de cent ans… » rappelle Carole Carpentier. En espérant faire évoluer les mentalités.




 D'autres armes existent pour intensifier la lutte contre ces amas de détritus. Depuis quelques mois, des collectivités et des associations ont développé des applications pour smartphones. A Marseille (appli
«Engagez-vous au quotidien»), à Roubaix («Vivacité») ou dans le Forez, les collectivités invitent les promeneurs à leur signaler les dépôts d'ordures illégaux. D’un simple clic, il est possible de géolocaliser et d’expédier une photo aux services communaux. A charge ensuite pour la collectivité de nettoyer le site et, parfois, de retrouver les auteurs de ces méfaits.



Une part importante de déchets liés à la construction

La chasse aux décharges illégales est aussi une préoccupation à l'échelle mondiale.
L’appli TrashOut, sortie en 2012, est disponible en dix langues. Son but ? Mobiliser les citoyens et aider les pouvoir locaux à prendre à bras le corps le problème. Les informations signalées par les utilisateurs sont transmises aux villes concernées. Une carte alimentée par les données recueillies permet de visualiser si le problème est traité ou non.







Plus de 630 signalements ont déjà été effectués par les usagers de TrashOut en France, dont un tiers en Ile-de-France.

Cet échantillon national permet d’en savoir plus sur les types de déchets le plus souvent abandonnés en pleine nature. Les déchets ménagers (créés par les particuliers) représentent près d'un tiers du volume. Les gravats et autres matériaux directement liés à la construction forment plus de 16% du contenu, auxquels s'ajoutent d'autres matières tels que les plastiques (19,6%) ou les métaux (12,6%). Quant à la part de détritus considérés comme dangereux par les déclarants, elle n'est pas négligeable (2,2%).



Source : http://www.leparisien.fr/environnement/ville-durable/la-chasse-aux-ordures-est-ouverte-09-04-2016-5700167.php

https://www.trashout.ngo/statistics/france/ile-de-france?hl=fr