DUP, PIG et OIN


Les Déclarations d'utilité publique (DUP), Les Projets d'intérêt général (PIG) et les Opérations d'intérêt national (OIN)
 

Essayons d'y voir plus clair au milieu de ces procédures administratives souvent utilisées pour faire passer des projets, très souvent immobiliers, en force.
 



A. Déclaration d'utilité publique (DUP)


 
Une déclaration d'utilité publique, abrégé par le sigle DUP, est une procédure administrative en droit français qui permet de réaliser une opération d'aménagement, telle que la création d'une infrastructure de communication, d'une école ou d'un lotissement par exemple, sur des terrains privés en les expropriant, précisément pour cause d'utilité publique ; elle est obtenue à l'issue d'une enquête d'utilité publique.

 
Cette procédure est nécessaire en vertu du Code civil qui prévoit (article 545) que « nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité ».


La déclaration d'utilité publique fait partie de la phase administrative de la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, gérée en France par un « Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique  ». Elle ne couvre par exemple pas la détermination de l'indemnité, qui relève de la phase judiciaire.

 

La procédure se déroule en deux temps.

 

I. L'enquête d'utilité publique


Le préfet lance (par arrêté préfectoral) une enquête publique visant à recueillir l'avis de toutes les personnes intéressées. Cette enquête doit durer au moins quinze jours si la procédure dépend du code de l'expropriation et au moins un mois si elle se fonde sur le code de l'environnement. En ce dernier cas, l'enquête s'appuie sur une étude d'impact lorsqu'il s'agit de gros projets ou de projets dépassant un certain seuil technique depuis la réforme de l'étude d'impact du 29 décembre 2011. Dans les deux cas de procédure, l'enquête publique permet, par exemple, au propriétaire d'un bien concerné par l'expropriation de contester l'utilité publique de l'opération envisagée.

Ces avis sont examinés par une commission et/ou par un commissaire-enquêteur qui formule un avis contenant des conclusions, favorables ou défavorables, sur le projet.

 

II. La déclaration

 
Après la fin de l'enquête, les pouvoirs publics peuvent prononcer la déclaration d'utilité publique.

Celle-ci doit prendre la forme d'un décret en Conseil d'État pour les opérations les plus importantes (construction d'une autoroute, d'une ligne de chemin de fer…). Dans le cas d'opérations moins importantes, si les conclusions de l'enquête sont favorables, la déclaration peut faire l'objet d'un simple arrêté ministériel ou préfectoral.


Le décret ou l'arrêté précise la durée pendant laquelle la déclaration reste valable et permet donc de procéder à des expropriations.

 

Les organismes pouvant bénéficier de l'expropriation

 

  • l'État
  • les collectivités territoriales
  • les établissements publics fonciers et les établissements publics d'aménagement
  • les sociétés d'économie mixte d'aménagement
  • les sociétés publiques locales d'aménagement
  • les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER)
  • les organismes HLM
  • les sociétés privées ou publiques chargées d'une concession de travaux publics

 

L'enquête d'utilité publique intervient trop tard.

Si trop d'enquêtes publiques ne sont qu'une "triste farce", pour citer André Périnet, du Syndicat national de défense des expropriés, cela tient d'abord au fait qu'elles portent sur des projets déjà très avancés. Dans la plupart des opérations, l'enquête ne constitue en effet qu'un des derniers passages obligés avant le démarrage des travaux. Un projet d'autoroute, par exemple, n'est soumis à enquête publique qu'une fois son tracé définitivement fixé, dans une bande de terrain de 300 m de largeur. Même si le commissaire-enquêteur émet un avis négatif – ce qui n'arrive que dans, environ 5 % des enquêtes – cela n'interdit pas au maître d'ouvrage de présenter immédiatement un nouveau dossier, identique ou presque au précédent, qui relance une nouvelle enquête. Il faut être conscient des limites d'une enquête d'utilité publique : ce n'est pas en se contentant d'y participer que l'on pourra réellement peser sur le projet.

 

Qu'il s'agisse d'un projet local ou de grands travaux nationaux, le citoyen a le droit de se prononcer, au travers des enquêtes d'utilité publique... Mais son avis est loin d'être toujours suivi. Pour influer sur un projet, mieux vaut intervenir dès son origine.

N'attendez pas l'enquête publique pour réagir, à ce stade, l'essentiel est joué

 



B. Projet d'intérêt général (PIG)



En France, un projet d'intérêt général désigne dans le domaine de l'aménagement du territoire un projet d’ouvrage, de travaux ou de protection, jugé d'utilité publique. Le PIG a été institué par un décret de 1983 et est régi par les Articles R.121-1 à R.121-3 du Code de l'urbanisme.


Peut constituer un PIG « tout projet d’ouvrage, de travaux ou de protection présentant un caractère d’utilité publique […] destiné à la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’équipement, au fonctionnement d’un service public, à l’accueil et au logement des personnes défavorisées ou de ressources modestes, à la protection du patrimoine naturel ou culturel, à la prévention des risques, à la mise en valeur des ressources naturelles ou à l’aménagement agricole et rural (…) ».

Le projet d’intérêt général (PIG) constitue depuis les lois de décentralisation de 1983 l’un des outils dont dispose l’État pour garantir la réalisation de projets présentant un caractère d’utilité publique, et relevant d’intérêts dépassant le cadre communal, voire intercommunal.


La qualification par le préfet d’un projet ayant un caractère d’utilité publique en PIG induit une obligation d’adaptation des documents d’urbanisme nécessaire à sa mise en œuvre.
La
loi portant engagement national pour l’environnement du 12 juillet 2010, a défini les directives territoriales d’aménagement et de développement durables (DTADD) qui ne sont pas directement opposables aux documents d’urbanisme, et a établi la possibilité de qualifier de projets d’intérêt général (PIG), les mesures de protection des espaces naturels, agricoles et forestier et autres aménagements nécessaires à la mise en œuvre des DTADD.

 
À la différence d'une DTA, le PIG est opposable aux tiers. C'est une règle forte d'urbanisme élaborée par l'État, transmise par le Premier ministre ou par le Préfet, aux autorités locales subordonnées (Conseil Régional, Mairies ou Conseil Général) pour la mise en place d'une infrastructure nécessaire de nature d'Intérêt Général.

Il peut parfois s'agir de permettre l'application de contrat Public-Privé (PPP) comme dans le cas de la Convention de 1987, signée entre l'État et l'entreprise Disney World.

 
Il peut donner à l'état ou à un porteur de « projet reconnu d'intérêt général » un droit d'exproprier pour les besoins du projet. En France, certaines opérations sont qualifiées « d'intérêt national ».

 
 

I - Définition et principes

 
Chargé, par l’article L.121-2 du code de l’urbanisme, de veiller au respect des principes d’urbanisme (article L. 121-1) et à la prise en compte des projets d’intérêt général, l’État informe l’EPCI ou la commune de la nécessite d’une mise en compatibilité des documents d’urbanisme locaux avec des projets et opérations d’aménagement, de construction, de travaux ou avec des prescriptions et règles supérieures.
Cette compétence d’attribution, justifiée par l’intérêt général et le respect du principe de légalité, est mise en œuvre dans le cadre de la procédure des projets d’intérêt général (PIG), instituée par la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences et réformée par la loi du 27 févier 2002 relative à la démocratie de proximité et la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement. Le code de l’urbanisme définit l’objet, la procédure et les effets de ces PIG. Tous les documents d’urbanisme sont concernés par cette obligation de mise en compatibilité avec le PIG, qu’il s’agisse d’un SCoT, d’un PLU ou d’une carte communale. Ils doivent être soit modifiés soit révisés pour faciliter la réalisation du projet qualifié de PIG.


Emplacement réservé :

Un emplacement réservé peut servir de périmètre d’accueil à un PIG. La réalisation du projet pour lequel un emplacement a été réservé doit se faire conformément aux dispositions du règlement de zone du PLU. L’érection au rang de PIG du projet considéré a pour effet de mettre le document d’urbanisme en compatibilité avec ce projet situé dans l’emplacement réservé.

 

II. Champ d’application des PIG

 
Les opérations et projets placés dans le champ d’application de la procédure de PIG, par l’article L.121-9 du code de l’urbanisme, se rattachent à deux grandes catégories. Depuis leur création, les PIG peuvent concerner tout projet d’ouvrage, de travaux ou de protection présentant un caractère d’utilité publique. La loi portant engagement national pour l’environnement du 12 juillet 2010 a étendu le champ d’application de ces dispositifs aux mesures nécessaires à la mise en œuvre des DTADD.

 

a. Tout projet d’ouvrage, de travaux ou de protection présentant un caractère d’utilité publique

 
Les articles L.121-9 et R.121-3 du code de l’urbanisme fournissent des précisions relatives aux critères d’identification de ceux des projets susceptibles d’être érigés au rang de PIG, en dehors du cas particulier des DTADD. Un tel projet doit être destiné :

  • à la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’équipement ;
  • au fonctionnement d’un service public ;
  • à l’accueil et au logement des personnes défavorisées ou de ressources modestes ;
  • à la protection du patrimoine naturel ou culturel ;
  • à la prévention des risques ;
  • à la mise en valeur des ressources naturelles ou à l’aménagement agricole et rural ;
  • à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques.

 

b. Mesures nécessaires à la mise en œuvre des directives territoriales d’aménagement et de développement durables (DTADD)

 
La loi du 12 juillet 2010 établit des liens entre les objectifs fixés dans le cadre des DTADD et les projets pouvant être qualifiés de PIG.

D’une part, En application de l’article L.113-1 du code de l’urbanisme, les DTADD « peuvent déterminer les objectifs et orientations de l’État en matière d’urbanisme, de logement, de transports et de déplacements, de développement des communications électroniques, de développement économique et culturel, d’espaces publics, de commerce, de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, des sites et des paysages, de cohérence des continuités écologiques, d’amélioration des performances énergétiques et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. ».

D’autre part, l’article L.113-4 du code de l’urbanisme prévoit, en effet, que pendant un délai de douze ans suivant la publication d’une DTADD, l’autorité administrative peut, après avis des collectivités locales, qualifier de PIG « les projets de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers ou des espaces soumis à des risques, les constructions, les travaux, les installations et les aménagements nécessaires à la mise en œuvre de cette DTADD. »

 

III. Le processus de conversion d’un projet ordinaire en PIG

 
La procédure des PIG est engagée à l’initiative d’une personne publique ou d’une personne privée investie d’une mission de service public (articles L.121-9 et R.121-3 du code de l’urbanisme), qui souhaite obtenir que des adaptations soient apportées à un document d’urbanisme. Elle en saisit officiellement l’autorité compétente en précisant le principe, les conditions de réalisation du projet et la mise à la disposition du public. L’exercice de ce pouvoir d’initiative ne suffit pas à conférer à un projet le statut juridique de PIG.

 

a. L’examen de la recevabilité d’une demande de qualification d’un PIG

 
Le préfet de département est l’autorité investie du pouvoir de décision en matière de qualification des PIG.
Le processus de qualification commence par la vérification de la recevabilité de la demande de « conversion » d’un projet ordinaire en PIG. Le préfet procède à une véritable instruction du dossier consistant à examiner les critères de fond, de forme, d’utilité publique, de compatibilité. 

 
Le dossier de PIG présente le contexte général, le descriptif du projet
Il doit être établi, dans cette phase, que le projet considéré a fait l’objet d’une décision préalable des organes de la personne publique ou privée ayant pris l’initiative. L’article L.121-9 exige, en effet, que le projet présenté, tout en répondant aux critères prédéfinis de l’utilité publique (fonctionnement d’un service public, accueil et logement des personnes défavorisées, protection du patrimoine, prévention des risques, remise en bon état des continuités écologiques), ait fait l’objet d’une délibération, d’une décision ou d’une inscription dans un document de planification, rendue publique.

 

b. La procédure de qualification proprement dite d’un PIG

 
La qualification, qui succède à l’examen de la recevabilité, obéit à une logique de « confrontation ». En vertu du pouvoir d’appréciation qu’il tient des textes, le préfet décide de placer ou non au-dessus des prescriptions d’un document d’urbanisme l’intérêt attaché à la réalisation d’un projet d’ouvrage, de construction ou d’aménagement en lui attribuant ou non la qualité de PIG.

 
Autrement dit, le préfet, saisi d’une demande de qualification, procède à un rapprochement entre un projet précis et les critères législatifs et réglementaires des PIG. Il en résulte un changement de statut du projet initial qui accède à la catégorie des PIG.

A l’issue de la qualification, le préfet notifie l’arrêté à la commune ou à l’EPCI concerné, en lui précisant les incidences du projet sur son document d’urbanisme.

Le dernier alinéa de l’article R.121-3, précise que ne peuvent être qualifiés de PIG « les projets relevant de l’initiative des communes ou de leurs groupements compétents pour élaborer un document d’urbanisme ou des communes membres de ces groupements ».
Les PIG sont toujours des projets extérieurs à la collectivité qui élabore le document.
La notion de PIG au sens de l’article R.121-3 du code de l’urbanisme ne doit pas être confondue avec celle de projet « présentant un intérêt général », au sens du dernier alinéa de l’article L.123-13 du code de l’urbanisme permettant à la collectivité d’adapter son Plan Local d’Urbanisme(PLU) par le biais de la procédure de déclaration de projet.

 

IV. Les effets juridiques attachés à l’arrêté de qualification d’un PIG

 
La notification à laquelle procède le préfet est un acte d’information qui produit des effets caractéristiques de la procédure des PIG.

 

a. Une mise en demeure d’adaptation des documents d’urbanisme

 
La notification de l’arrêté préfectoral a pour effet de placer les autorités compétentes des communes ou des EPCI concernés dans une situation de compétence liée consistant à engager la procédure d’adaptation du document d’urbanisme visé.

 
L’obligation de faire qui résulte de la notification obéit à des délais spécifiques. Lorsqu'un SCOT est visé, l’EPCI disposera de trois mois, suivant la notification, pour indiquer au préfet son intention d’effectuer ou non la mise en compatibilité requise pour la réalisation du PIG. En cas de réponse positive, la modification ou la révision devra intervenir dans un délai de 24 mois (article L.122-15-1 du code de l’urbanisme). En cas de mise en compatibilité d’un PLU (article L.123-14 du code de l’urbanisme), la commune bénéficiera d’un délai d’un mois, suivant la notification, pour faire connaître au préfet si elle entend opérer ou non la révision ou la modification nécessaire. En cas de réponse positive exprimée dans le délai d’un mois, la commune disposera d’un délai de six mois pour adopter la délibération approuvant la modification ou la révision du PLU.

 

b. Le pouvoir de substitution du préfet

 
La notification de l’arrêté de qualification d’un PIG octroie, par ailleurs, au préfet un pouvoir de substitution en cas de refus ou de carence des autorités décentralisées mises en demeure. L’attribution de ce pouvoir de substitution se distingue de son exercice. La mise en œuvre d’un tel pouvoir est subordonnée au constat de refus (dès la notification de l’arrêté) ou de carence des communes ou EPCI (absence de mise en compatibilité à l’expiration des six mois ou des 24 mois, selon les cas). L’exercice éventuel, par le préfet, de son pouvoir de substitution, consistera à apporter directement aux documents d’urbanisme les changements nécessaires à la réalisation du projet qualifié de PIG.

A la différence du pouvoir de qualification, le pouvoir de substitution, une fois exercé, produit des effets portant sur les modes d’utilisation des sols, au-delà de la seule réalisation de l’opération. Les changements apportés aux documents d’urbanisme vaudront pour tous les administrés, en raison du caractère réglementaire de l’acte approuvant la modification ou la révision.

 

c. La durée de validité d’un PIG

 
L’arrêté de qualification d’un PIG est valable trois ans à compter de sa notification. Il peut être renouvelé. Au cours de la durée de validité, les documents d’urbanisme mis en compatibilité ne pourront être modifiés, ni révisés dans un sens susceptible de rendre le PIG incompatible avec eux. La non prise en compte des PIG notifiés, pendant leur durée de validité, rend illégaux les documents d’urbanisme concernés.

 

V. Le contentieux des actes de qualification des PIG

 
Les différents actes administratifs intervenant dans la procédure de qualification d’un PIG, à savoir la décision de l’autorité ayant pris l’initiative d’un PIG, celle par laquelle le préfet qualifie ou non le projet et la décision par laquelle telle commune ou tel EPCI est mis en demeure de modifier ou de réviser son document d’urbanisme, sont susceptibles d’être contestés devant le juge administratif. Ils sont réputés faire grief (CE, 3 février 1992, Commune de Soulom, rec., p. 52 ; CE, Section, 30 octobre 1992, ministre des affaires étrangères et secrétaire d’Etat aux grands travaux, n°140220 ; CE, 18 novembre 2009, Commune de Saint-Denis-les-Sens, n°309096).

 

Si les communes et les EPCI subissant une mise en compatibilité de leurs documents d’urbanisme, par l’effet d’un PIG, ne manquent pas d’introduire des recours en annulation contre les arrêtés préfectoraux, il n’est pas rare, non plus, que des personnes privées, dont des biens ou des projets sont affectés par un PIG, saisissent le juge de l’excès de pouvoir de demandes tendant à obtenir l’annulation l’arrêté de qualification (CE, 7 février 2007, Société Sagace, Société méditerranéenne de nettoiement, n°287252 ; CE, 4 juin 2012, SARL du parc d’Activité de Blotzheim et SCI Haeselaecker, n°340213).

 

a. Le contrôle juridictionnel des PIG

 
Le juge administratif, saisi d’un recours dirigé contre un acte relatif à la procédure des PIG, exerce, selon les cas, un contrôle fondé sur le bilan coûts-avantages de l’utilité publique du projet ou un simple contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation (CE, 4 juillet 1997, Les Verts d’Ile-de-France, n°143842 ; CE, 21 juin 1999, Commune de la Courneuve, Droit Administratif, septembre 1999, p. 34 ; E, 5 novembre 2001, Commune Cannet-des-Maures, Collectivités territoriales – Intercommunalité, janvier 2002, n° 18 ; CE, 28 juillet 2000, Port Autonome de Saint-Nazaire, n°135835 ; CE, 7 février 2007, Société Sagace, Société méditerranéenne de nettoiement, n°287252).

Un recours en annulation dirigé contre un PIG est susceptible d’être assorti d’une demande de suspension au titre de l’article L.521-1 du code de justice administrative.

Le contrôle juridictionnel des actes relatifs aux PIG contribue à concilier les conséquences de la qualification ou de son refus avec le principe constitutionnel de libre administration et avec les principes résultant des dispositions de l’article L. 110 du Code de l’urbanisme.

 

b. Les PIG, la Constitution et la Cour européenne des Droits de l’Homme


Parallèlement au contentieux ordinaire, certains recours dirigés récemment contre des actes de qualification de PIG ont soulevé des questions portant sur la conformité de la procédure des PIG à la Constitution ou à la CEDH (Cour européenne des Droits de l’Homme).

 Dans une décision n°2010-95 du 28 janvier 2011, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution l’article L. 121-9 du code de l’urbanisme, car ce texte, qui se borne à renvoyer à des décrets en Conseil d’État le soin de déterminer les conditions d’application du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l’urbanisme relatif aux dispositions générales communes aux SCOT, aux PLU et aux cartes communales, ne met pas en cause les principes fondamentaux garantis par la Constitution. La définition de la nature des PIG ne met pas davantage en cause ces mêmes principes.

 L’acte de qualification d’un PIG ne peut être assimilé à un document d’urbanisme, car il ne comporte, en soi, aucune règle d’occupation du sol. Il s’agit d’un projet devant conduire à la révision ou la modification du document existant (CE, 18 novembre 2009, Commune de Saint-Denis-les-Sens c/ Communauté de communes du Sénonais, n°309096 ; BJDU n°5/2009, p.392, obs. B. Poujade ; RDI n°3, mars 2010, p.172, obs. P. Soler-Couteaux ; JCP A, n°49-50, 30 novembre 2009, p.6).

 Un arrêté de qualification d’un PIG, qui s’impose aux documents d’urbanisme des personnes publiques auxquelles il est notifié, n’est pas directement opposable aux autorisations d’urbanisme et ne porte pas, en lui-même, atteinte au droit au respect des biens, garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CE, 4 juin 2012, SARL du Parc d’Activité de Blotzheim et SCI Haeselaecker, n°340213).

 Un tel arrêté ne peut être assimilé à un acte de dépossession au motif qu’il a pu justifier un sursis à statuer fondé sur l’article L.111-10 du code de l’urbanisme (CE, 11 juillet 2011, Société du Parc d’Activités de Blotzheim, n°317272, AJDA, 2011, p.1462, obs. A. Vincent).

 

Textes et références

 
 Code de l’urbanisme :
. Partie législative : articles L. 113-4 ; L. 121-2, L. 121-9.
. Partie réglementaire : articles R. 121-3, R. 121-4-1


 Lois :
. Loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État ;
. Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;
. Loi n° 2002-276 du 27 févier 2002 relative à la démocratie de proximité ;
. La loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement.

 

 Décrets :
.
Décret n° 83-813 du 9 septembre 1983 ;
. Décret n° 2001-260 du 27 mars 2001.
. Décret n°2007-18 du 5 janvier 2007.

Circulaire du 27 juin 1985 (JO, 3 août 1985).
Circulaire du 8 novembre 2002 relative aux opérations programmées d’amélioration de l’habitat et au programme d’intérêt général

 

 

C. Opération d'intérêt national


 
Une opération d'intérêt national (OIN) est, en France, une opération d'urbanisme à laquelle s'applique un régime juridique particulier en raison de son intérêt majeur. L'État conserve dans ces zones la maîtrise de la politique d'urbanisme.

 

I. Régime des opérations d'intérêt national

 
Les opérations d'intérêt national sont soumises à l'article L121-2 du code de l'urbanisme1. Un décret en Conseil d'État peut créer ou supprimer une OIN.

Dans une opération d'intérêt national, c'est l'État et non la commune qui délivre les autorisations d'occupation des sols et en particulier les permis de construire. De même, c'est le préfet et non la commune qui décide de la création d'une zone d'aménagement concerté (ZAC) à l'intérieur d'une OIN.

La loi portant engagement national pour le logement, dite Borloo, adoptée en juillet 2006, vise à conférer le caractère d'« intérêt national » à des opérations de logements sociaux sur des terrains appartenant à l'État ou à ses établissements publics.

 

II. Impact juridique et institutionnel de la délimitation d’un périmètre d’OIN :

 
Le recours à la catégorie juridique "Opérations d’intérêt national" trouve sa signification juridique et politique dans le fait que la délimitation matérielle d’un périmètre d’"Opération d’intérêt national" emporte des effets juridiques modifiant les règles applicables, la répartition des compétences, la hiérarchie des normes et les procédures d’élaboration des règles et documents d’urbanisme.

 

1. Délimitation d’une "Opération d’intérêt national" et exclusion de la règle de constructibilité limitée :

 
L’intérêt national attaché à la réalisation des opérations et programmes de toute sorte ayant justifié le recours à la procédure des opérations d’intérêt national a pour effet de lever l’obstacle qu’aurait constitué la règle de constructibilité limitée si l’opération devait se situer, géographiquement, en dehors des "parties actuellement urbanisées" d’une commune dépourvue de document d’urbanisme.

Le législateur choisit de faire de l’exécution d’une "OIN" une des exceptions à cette règle de constructibilité limitée. En application de l’article L.111-1-2 2° du Code de l’urbanisme : "Sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : … les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à la réalisation d’aires d’accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à l’exploitation agricole, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d’opérations d’intérêt national".

 

2. Assujettissement des documents locaux d’urbanisme aux "Opérations d’intérêt national" :

 
Délimitées par l’État dans le cadre de sa politique d’aménagement du territoire national, les opérations d’intérêt national sont prévues pour être respectées par les documents d’urbanisme élaborés par les communes ou leurs groupements, dans un rapport de "prise en compte". Les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d’urbanisme, les plans d’occupation des sols, les cartes communales situés dans le périmètre d’une opération d’intérêt national ne sauraient en contrarier la réalisation.

Il est à noter ici que les "POIN" issus de la loi du 13 juillet 2006 sont placés à cet égard, dans une situation juridique quelque peu inversée. Non seulement pour leur instauration, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d’urbanisme sont obligatoirement consultés sur les projets de décrets (leur avis est réputé favorable s’il n’a pas été émis dans un délai de deux mois), mais et surtout les décrets portant délimitation de ces périmètres sont dans l’obligation législative de tenir compte de l’économie générale des projets d’aménagement et de développement durable des schémas de cohérence territoriale et, en l’absence de schéma de cohérence territoriale, des plans locaux d’urbanisme déjà approuvés (article 1er I de la loi du 13 juillet 2006).

 

3. Attribution à l’État des compétences d’urbanisme au sein des "Opérations d’intérêt national" :

 
La délimitation, par décret, d’un périmètre d’opération d’intérêt national, au sens de l’article L. 121-2 du Code de l’urbanisme ou en application de l’article 1er de la loi du 13 juillet 2006, introduit automatiquement des exceptions à la décentralisation et au transfert des compétences en matière d’urbanisme. Les autorités de l’État redeviennent compétentes :

  • Pour délivrer les autorisations d’occupation ou d’utilisation des sols : permis de construire, permis d’aménager, permis de démolir, ou pour statuer sur les déclarations préalables (article L. 422-2 du Code de l’urbanisme), y compris lorsque les communes concernées sont dotées d’un plan local d’urbanisme.

  • Pour créer des zones d’aménagement concerté situées dans ces périmètres, après avoir recueilli l’avis du conseil municipal de la commune sur le territoire de laquelle est située l’opération d’aménagement (article L. 331-1 alinéa 3 du Code de l’urbanisme).

 
NB : Il n’est pas inutile de souligner l’attribution, par l’article 15 de la loi ENL, aux communes et aux EPCI titulaires du droit de préemption urbain, d’un droit de priorité en vue d’acquérir les terrains du domaine privé de l’Etat destinés à être utilisés dans des opérations tendant à réaliser des équipements publics ou des logements à usage locatif (articles L.211-2 et L.213-3 du Code de l’urbanisme ; article L.351-2 3° du Code de la construction et de l’habitat). Ce droit de priorité porte sur les biens immeubles constitutifs de l’assiette même des "POIN" de la loi de 2006.

 

4. Particularisme des règles d’urbanisme applicables dans le périmètre de l’« Opération d’intérêt national » du quartier de la défense

 
L’article L.141-4 nouveau du Code de l’urbanisme, issu de l’article 1er de la loi n° 2007-254 du 27 février 2007, habilite le Gouvernement à doter le quartier de La Défense de règles d’urbanisme propres. Mais il s’agit de règles ayant un champ d’application partiel et un caractère provisoire, dans la mesure où elles ne seront rendues applicables que dans les périmètres de l’opération non couvertes par un document d’urbanisme et cesseront d’être applicables dès l’approbation d’un document d’urbanisme par les communes concernées (Courbevoie et Puteaux).

Il en résulte que le quartier de La Défense se distingue, en tant qu’opération d’intérêt national, par l’application de règles d’urbanisme issues tantôt de documents communaux d’urbanisme, tantôt du Règlement national d’urbanisme et tantôt de décrets pris spécialement en application de l’article L.141-4 du Code de l’urbanisme.

La notion d’« Opération d’intérêt national » renforce ainsi ses spécificités juridiques en termes d’aménagement et d’urbanisme.

 

 

III.  Opérations d'intérêt national existantes

 
La liste des opérations d'intérêt national est fixée par un décret en Conseil d'État, repris à l'article R. 121-4-1 du code de l'urbanisme :

·         les villes nouvelles : dont deux sont opérationnelles en 2014, Marne-la-Vallée et Sénart ;

·         la Défense, quartier d'affaires ;

·         l'opération d'intérêt national Paris-Saclay : projet d'aménagement concernant 27 communes du sud-ouest de l'Île-de-France dont le but est la création d'un cluster scientifique et technologique ;

·         les complexes industriels et portuaires d'Antifer (Le Havre), du Verdon (Bordeaux) et de Dunkerque ;

·         la zone d'aménagement de Fos-sur-Mer ;

·         l'établissement public d'aménagement Euroméditerranée (Marseille) ;

·         l'opération Seine-Arche (prolongement de la Défense à Nanterre) ;

·         les aéroports de Paris-Charles-de-Gaulle, de Paris-Orly et de Paris-Le Bourget ;

·         l'opération d'aménagement et de renouvellement urbain de Saint-Étienne (Décret no 2007-89 du 24 janvier 2007) ;

·         l'opération d'intérêt national Seine-Aval, coordonnée par l'Établissement public d'aménagement Mantes-Seine Aval (EPAMSA) ;

·         l'opération d'aménagement Orly-Rungis-Seine Amont (ORSA), dans le sud de l'Île-de-France ;

·         l'opération d'aménagement de Éco-Vallée à Nice ;

·         l'opération Euratlantique autour de Bordeaux ;

·         l'opération Alzette-Belval à la frontière du Luxembourg et de la Lorraine.

...

 

 

IV.  Les territoires d’intérêt national en Île-de-France

 

Projets de CIN (Contrat d’intérêt national)

– Franges de la Plaine de Montesson (Carrières-sur-Seine, Montesson, Sartrouville);

– Abords des gares du Transilien (Rambouillet, Coignières, les Essarts-le-Roi, Le Perray-en-Yvelines);

– Site du panorama (Clamart, Fontenay-aux-Roses, Châtillon);

– Charenton-le-Pont;

– Canal de l’Ourcq;

– Franges de la forêt de Pierrelaye (Pierrelaye, Herblay, Saint-Ouen-l’Aumône, Bessancourt);

– Corridor aéroportuaire (Aulnay-sous-Bois, Le Blanc-Mesnil, Le Bourget, Dugny, Gonesse, Mitry-Mory, Roissy-en-France, Tremblay-en-France, Villepinte);

– Vallée scientifique de la Bièvre pour le développement du «pôle santé».

 

Projets d’extension ou de modification d’OIN (Opération d’intérêt national)

– OIN Seine Aval (Mantes-la-Jolie);

– OIN Saclay: Quartier Camille-Claudel (Palaiseau)

– OIN La Défense et OIN Seine-Arche: (Courbevoie, la Garenne – Colombe, Nanterre, Puteaux);

– OIN Orly – Rungis – Seine Amont.

 

Projets de création d’OIN

– Portes sud du Grand Paris (Bondoufle, Courcouronnes, Corbeil-Essonnes, Évry, Grigny, Fleury-Merogis, Ris-Orangis);

– Champigny-sur-Marne, Villiers-sur-Marne, Sucy-en-Brie, Ormesson, Chenevières (CIN dans un premier temps et discussion pour une OIN ultérieure);

– Argenteuil;

– Territoires de Roissy Nord à vocation strictement économique;

– Aulnay-sous-Bois et Gonesse: ancien site industriel PSA;

– Campus Grand Parc – Villejuif.

 

Par ailleurs des discussions se poursuivent sur certains territoires sur les modalités d’accompagnement de l’État

– Melun (Villaroche) et Dammarie-les-Lys (clos Saint-Louis);

– Pantin et Aubervilliers (ZAC du Fort);

– Plaine Commune (toutes les communes de la communauté d’agglomération).