Les rongeurs en vergers de production biologique : méthodes de lutte préventive et continue

Les rongeurs en vergers de production biologique : méthodes de lutte préventive et continue

Courrier de l’environnement de l’INRA n°58, mars 2010


Limiter le recours aux substances chimiques pour la préservation des cultures est le défi nouveau de l’agriculture – une «  rupture  » avec des années de développement fondé sur la logique «  un problème, un produit  ». Mais cette simplification a privilégié de fait les stratégies individuelles au point que, parfois, des stratégies collectives de lutte utilisant ces produits avec parcimonie n’ont pu s’implanter. Nouvel angle d’attaque, l’écologie du paysage s’intéresse à la dynamique spatio-temporelle des composantes biologiques, physiques et sociales des paysages humanisés et/ou naturels. Ici, pour l’arboriculteur, il importe dorénavant d’intégrer le rôle des autres parcelles qui environnent son verger, et de comprendre les mœurs de ses vrais ennemis, par exemple ceux qui, parmi les campagnols, mangent occasionnellement non pas l’usufruit (les parties aériennes) mais le capital (les racines) du verger. Ce faisant, il sera confronté à des incertitudes scientifiques et techniques, voire à des contradictions. Par exemple, devra-t-il limiter la couverture du sol ou la laisser pour des raisons hydrologiques ? En poussant plus loin, est-il économiquement viable pour l’arboriculture d’abandonner les zones herbagères ? Il y a de quoi discuter pendant un moment.


Les perspectives de développement de l’agriculture biologique se heurtent en particulier à la difficulté de lutter contre certains ravageurs. En arboriculture, les problèmes posés par les rongeurs peuvent trouver des solutions pratiques. Elles seront cependant de nature essentiellement préventives.

Leur acceptation par les professionnels sera d’autant plus facile que l’efficacité des rodenticides est relativement faible, que leur usage est dangereux pour la faune auxiliaire et engage l’exploitant dans une stratégie de lutte répétitive et peu rentable (Godfrey et Ashkam, 1988).

En effet, si les conditions du milieu demeurent favorables, les capacités de dispersion et de croissance démographique des populations de rongeurs sont telles qu’elles constituent une menace permanente pour la survie des arbres et pour la production (Byers, 1984 ; Delattre et Giraudoux, 2005).

 Production biologique ou protection intégrée ?

Dès les années 1970, le constat fut fait par quelques collègues « invertébristes » qu’il était possible de conduire un verger en production biologique dans un environnement entomologique favorable, en l’occurrence celui d’une parcelle contiguë à un système forestier (Couturier, 1973). Inversement, les expériences menées depuis pour promouvoir les méthodes de protection intégrée ont fait apparaître des difficultés à développer des stratégies de lutte efficaces dans des agrosystèmes dont les peuplements naturels, végétaux et animaux, sont naturellement et potentiellement trop pauvres. Pour diminuer les risques de développe- ment des ravageurs dans un verger, la proximité d’un environnement « protecteur » serait donc plus importante que la réduction de l’emploi des pesticides ou leur choix sélectif tels que le préconisent les tenants de la protection intégrée (Ferron, 1999 ; Deguine et Ferron, 2004).
Dans les deux situations, production biologique ou protection intégrée, l’objectif recherché est le même : augmenter le flux des facteurs de régulation que représentent les auxiliaires naturels (prédateurs et maladies parasitaires).

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