c. Les biocarburants
Introduction
Définition:
Un
biocarburant ou agrocarburant est un carburant produit à partir de matériaux
organiques renouvelables et non-fossiles, pouvant se substituer aux carburants
pétroliers pour faire rouler, notamment, des véhicules à carburants. La
production de ces agrocarburants peut être effectuée à partir d'un ensemble de
techniques variées.
On distingue
3 grands types de biocarburants selon leur origine :
Biocarburants de 1ère génération
Fabriqués à
partir des graines des plantes, suivant deux filières industrielles : La
filière oléagineuse, qui produit du diester (ou biodiesel) à partir de colza ou
de tournesol ; et la filière éthanol qui produit de l'alcool à partir du blé,
du maïs ou de la betterave.
Biocarburants de 2e génération
Élaborés
grâce à la totalité des plantes, y compris les résidus végétaux, forestiers.
Biocarburants de 3e génération
Fabriqués à
partir d'algues (Algocarburant)
Les
différentes voies d'obtention de biocarburants à partir de la biomasse végétale
Complément:Les
biocarburants : une source d'énergie nouvelle ?
L'utilisation
de carburants d'origine végétale ne date pas de maintenant. Déjà, dès le début
de l'industrie automobile, les fabricants avaient utilisé ce type de carburant
pour faire fonctionner les véhicules. Ainsi Rudolph Diesel déclarait en
1912 :
« l'utilisation
d'huiles végétales dans les moteurs Diesel peut sembler insignifiante
actuellement. Mais ces huiles peuvent devenir avec le temps aussi importantes
que le sont aujourd'hui les produits pétroliers ou issus du charbon ».
Contexte et enjeux
Deux
préoccupations majeures
Il existe
aujourd'hui deux préoccupation majeures concernant l'approvisionnement en
combustibles utilisés dans le transport :
- augmentation de la concentration
en gaz à effet de serre dans l'atmosphère ;
- niveau des réserves mondiales des
combustibles fossiles et leur prix.
Une dépendance très forte aux carburants d'origine pétrolière
Au niveau
mondial, le secteur des transports dépend à près de 94 % du pétrole et
représente plus de 50 % de la consommation de pétrole dans le monde.
|
Consommation
mondiale d'énergie dans le secteur des transports routiers en 2009 en
pourcentage (GPL : gaz de pétrole liquéfié, GNV : gaz naturel pour
véhicules)
|
Enjeux des combustibles renouvelables comme la biomasse
- diminuer les émissions de CO2 ;
- trouver des alternatives au
pétrole.
Rappels : les différents types de moteurs
Définition:Moteur
à explosion (à combustion interne)
Machine où
l'énergie thermique dégagée par la combustion est transformée en énergie
motrice mécanique directement à l'intérieur du moteur :
Il existe
quatre types principaux de moteurs à combustion interne :
- le moteur à allumage commandé, ou
moteur à essence,
- le moteur Diesel,
- le moteur à piston rotatif,
- la turbine à gaz.
Principe
général d'un moteur à explosion 4 temps
Le cycle de
fonctionnement se décompose de manière analytique en quatre temps ou phases.
- admission d'un mélange air et de
carburant vaporisé, présent dans le conduit d'admission, mélange préparé
par divers composants (carburateur ou système d'injection
indirecte) : ouverture de la soupape d'admission et descente du
piston, ce dernier aspire ainsi ce mélange dans le cylindre à une pression
de -0,1 à -0 3 bar ;
- compression du mélange :
fermeture de la soupape d'admission, puis remontée du piston qui comprime
le mélange jusqu'à 30 bars et 400 à 500 °C dans la chambre de
combustion ;
- combustion (détente aux environs
du point mort haut) : moment auquel le piston atteint son point
culminant et auquel la compression est au maximum ; la bougie
d'allumage, connectée à un générateur d'électricité haute tension, produit
une étincelle ; la combustion rapide qui s' ensuit constitue le temps
moteur ; les gaz chauds à une pression de 40 à 60 bars
repoussent le piston, initiant le mouvement ;
- échappement : ouverture de
la soupape d'échappement et remontée du piston qui chasse les gaz brûlés
détendus dans le collecteur d'échappement, laissant la place à une
nouvelle charge de mélange air/carburant.
Un nouveau
cycle commence en 1.
Exemple
d'un cycle moteur à 4 temps
Dans le
secteurs des transports routiers, les deux grands types de moteurs sont :
- le moteur à essence ;
- le moteur Diesel.
Les filières
biocarburants utilisées pour les substituer les carburants d'origine pétrolière
(essence/gazole) sont différentes :
- Filière éthanol/ETBE pour
l'essence ;
- Filière huile végétale /EMHV pour
la gazole.
Les biocarburants de 1ère génération
Introduction
À la
naissance de l'industrie automobile, le pétrole et ses dérivés n'était pas
encore très utilisés ; c'est donc très naturellement que les motoristes se
tournaient, entre autre, vers ce qu'on n'appelait pas encore des biocarburants
: Nikolaus Otto, inventeur du moteur à explosion, avait conçu celui-ci pour
fonctionner avec de l'éthanol (Cf Ford T). Rudolf Diesel, inventeur du moteur à
combustion faisait tourner ses machines à l'huile d'arachide (prévu aussi pour
graisses végétales ou animales).
Type de biomasse
Que type
de biomasse est utilisé pour la production de biocarburants de 1ère
génération ?
C'est
généralement de la biomasse agricole de type :
- Productive en graines amylacées (blé, maïs, sorgho, ...)
- Productive en saccharose (canne à sucre, betterave)
- Productive en graines oléagineuses (colza, tournesol, soja, jatropha, ...)
Cependant les
rendements à l'hectare sont très différents selon les types de culture :
la canne à sucre et la betterave (pour la filière
éthanol) et l'huile de palme (pour la filière
biodiesel) ont des rendements dépassant les 4 000 litres à l'hectare.
Les deux grandes filières de production des biocarburants de 1ère génération
La filière
essence
La filière
biocarburant « essence », pour les véhicules essence, comprend l'éthanol et son
dérivé l'ETBE (Ethyl-tertio-butyl-éther).
Le sucre
extrait des plantes à saccharose est fermenté afin d'obtenir de l'alcool
(éthanol). Celui-ci est alors soit directement incorporé à l'essence, soit
transformé en ETBE.
Biocarburants
de 1ère génération : filière éthanol
L'ETBE peut
être incorporé jusqu'à 15% en volume dans l'essence. Bien qu'il présente des
propriétés supérieures à celles de l'éthanol, le gouvernement français a incité
début 2007 à développer la filière E85 (85% d'éthanol dans l'essence). Le
mélange éthanol/essence présente un certain nombre d'inconvénients, notamment
un plus faible pouvoir de combustion que l'ETBE.
L'ETBE permet
d'obtenir un carburant liquide dont les propriétés se rapprochent de celles de
l'essence.
Propriétés
physiques de l'éthanol et de l'ETBE
La filière
gazole
La filière
biocarburant « gazole », pour les véhicules Diesel, est constituée par les EMAG
(Esters Méthyliques d'Acides Gras) fabriqués à partir d'huiles végétales (on
parle alors d'EMHV, Ester Méthyliques d'Huiles Végétales), de graisses animales
ou d'huiles usagées recyclées.
Biocarburants
de 1ère génération : filière gazole
Une tonne
d'huile avec 0,1 tonne de méthanol produit une tonne d'EMHV et 0,1 tonne de
glycérine.
L'EMHV est
utilisé sous deux formes en France :
- Une incorporation faible
banalisée (de l'ordre de 5% en volume) dans le gazole, conformément à
l'arrêté du 23 décembre 1999 modifié relatif aux caractéristiques du
gazole et du gazole grand froid.
- Une incorporation bien plus
élevée (30% en général), pour utilisation dans des flottes urbaines
spécifiques autorisées par dérogation.
Les esters
méthyliques permettent d'obtenir un carburant liquide dont les propriétés se
rapprochent de celles d'un gazole standard.
Comparaison
des propriétés des différents esters à celles d'un gazole standard
Les huiles
végétales et les EMHV peuvent être utilisées pures dans certains types de
véhicules à condition d'apporter des modifications mineures (réglages
d'injection, installation de filtres).
Complément:Usine
de Diester du groupe Sofiproteol
Le port de
Sète (Hérault) accueille une usine de production de Diester du groupe
Sofiproteol. L'unité a démarré en 2006 et produit 200 000 t/an d'EMHV issus de
colza.
Port de
Sète (Hérault) : usine de Diester du groupe Sofiproteol
Le marché
Mode
d'utilisation
Le
biocarburants de 1ère générations peuvent être utilisés d'ores et déjà dans la
plupart des véhicules dans la limite des spécifications imposées par l'Union
Européenne (E5, B5 voire B10, E10). E fait référence à l'éthanol et B au
biodiesel. Des flottes spécifiques de véhicules, pour lesquelles les moteurs
ont été modifiés, peuvent accepter l'incorporation de plus grandes quantités de
biocarburant (E23, B30, FFV - E 85).
Monde
Production
mondiale de biocarburants
Plus de 60
Mtep de biocarburants on été produits dans le monde en 2011, soit 6 fois plus
qu'en 2000.
Évolution
de la production de biocarburants de 1ère génération entre 2000 – 2011
En 2011 la part des biocarburants dans la production mondiale des carburants était de 2,5 %. En prenant la production en volume, près de 4 fois plus d'éthanol a été produit par rapport au biodiesel. |
Si on s'intéresse à la répartition de la production selon les pays et les filières, on note que :
- les USA et le Brésil dominent la
production d'éthanol (près de 73 %) ;
- l'Europe est le 1er producteur de
biodiesel (39 %), suivi des USA (17%).
Répartition
de la production de biodiesel dans le monde en 2011
Union Européenne
En octobre
2012, la Commission a dévoilé un projet de directive plafonnant la part des
carburants d'origine végétale de première génération (produits à base de
cultures alimentaires). Ces carburants, biodiesel et bioéthanol, qui
représentent aujourd'hui 4,5% de la consommation d'énergie du secteur des
transports dans l'Union, ne devront ainsi pas dépasser le seuil des 5% d'ici
2020.
En 2011, la
consommation totale s'élevait à près de 14 Mtep; l'Allemagne étant le pays qui
produit le plus de biocarburants (≈ 3 Mtep), suivi de la France (≈2,4 Mtep).
Consommation
de biocarburants destinés au transport dans l'Union Européenne en 2011 (en tep)
Les biocarburants de 2ème génération
Généralités
Les
biocarburants de 2ème génération sont produits à partir de ressources
ligno-cellulosiques (résidus agricoles et forestiers de cultures dédiées, de
déchets organiques)
Avantages par
rapport aux biocarburants de 1ère génération :
- compétition limitée avec la
filière alimentaire ;
- coût des matières premières
faible ;
- peu de co-produits et volumes de
biocarburants produits plus important ;
- bilan CO2 plus
favorable.
Les filières
Les
biocarburants de 2ème génération peuvent être fabriqués selon deux types de
procédés :
- par voie thermochimique : la biomasse ligno-cellulosique
est gazéifiée afin d'obtenir un gaz de synthèse (ou syngas), qui après une
synthèse dite de Fischer-Tropsch produit un hydrocarbure pouvant être
incorporé au gazole ;
- par voie biochimique : la biomasse
ligno-cellulosique est dégradée par hydrolyse enzymatique afin d'extraire
les sucres qu'elle contient ; après fermentation, l'éthanol produit
peut être mélangé à l'essence.
Biocarburants
de 2ème génération
Quel type
de biomasse utiliser pour la production de biocarburants de 2ème
génération ?
Biomasse
forestière :
- futaie à croissance rapide (pin
maritime, robinier faux acacia) ;
- taillis sous exploités ;
- rémanents et résidus.
Cultures dédiées :
- céréales plantes entières
(triticale) ;
- hybrides à forte productivité
(miscanthus, switchgrass) ;
- taillis à courte rotation (TCR de
saule, de peuplier).
Le miscanthus
a un rendement très intéressant de 4 tep/hectare.
Rendement à l'hectare de biocarburants de 2ème génération produits à partir de biomasse lignocellulosique
Complément:Choren
Une unité
pilote produit d'ores et déjà du carburant liquide à partir de biomasse. Le
potentiel en bioénergie en Allemagne permettrait de produire 30 millions de
tonnes de SunFuel.
Cela
correspond à 50% de la consommation totale automobile en Allemagne.
Exemple de
Choren
Les biocarburants de 3ème génération
L'obtention
de substances lipidiques (triglycérides) à partir de microalgues permet de
synthétiser des "Algocarburants".
C'est
probablement à partir des cultures de microalgues, d'un point de vue théorique
30 à 100 fois plus efficaces que les oléagineux terrestres d'après certains
auteurs, que des agrocarburants pourront être produits avec les meilleurs
rendements, rendant ainsi envisageable une production de masse (par exemple
pour l'aviation), sans déforestation massive ni concurrence avec les cultures
alimentaires.
Exemple de
bioréacteur permettant la culture d'algues pour la production de biocarburants
de 3e génération
Le rendement
de conversion de l'énergie solaire en biomasse par les microalgues est meilleur
qu'avec les cultures terrestres mais reste très faible, de l'ordre de 1,5%.
D'après Y.
Christyi in «Biodiesel from microalgae», Biotech Adavances, 2007 :
« Pour
remplacer les carburants utilisés au USA par du biodiesel issu de plantes
terrestres, il faudrait une surface supérieure à celle du pays. »
« En
comparaison les micro-algues ne demanderaient que 2% du territoire, dans des
déserts, avec de l'eau de mer comme source liquide. »
Cependant
l'huile de microalgue est très loin d'être compétitive sur le marché.
La culture de
microalgues nécessite de très importants apports en engrais et en substances
chimiques afin d'inhiber la croissance des bactéries et autres micro-organismes
qui ont tendance à envahir les bioréacteurs ou les bassins.
Les problématiques liées aux biocarburants
Les
biocarburants suscitent de multiples interrogations, même si leur place est
actuellement minime (2% des surfaces cultivées, 2 % des consommations de
carburants). Des plans ambitieux de développement sont mis en œuvre au Brésil,
USA, Asie...
Avantages et inconvénients de l'utilisation de biocarburants
Avantages
et inconvénients apparents des biocarburants
Bilan
énergétique
La
fabrication de biocarburants est moins « énergivore » que pour la
fabrication de l'essence à partir du pétrole.
Bilan
énergétique des carburants et des biocarburants
Des bilans
Énergie/GES discordants
Selon les
auteurs, les bilans sont parfois discordants.
Indicateurs :
[1]
Efficacité énergétique énergie fossile dépensée (MJ)/énergie fournie (MJ) au
terme du processus de fabrication
[2] Réduction
d'émission de GES %
de réduction (CO2, N2O et CH4 en CO2eq)
par kilomètre parcouru du champ àla roue (well-to-wheels) par rapport à un
véhicule «classique »
[3] Rendement
typique en litre par hectare
(Source Dorin).
Bilan
énergétique et bilan effet de serre des biocarburants de 2ème génération
Cependant
une étude de l'IFP Energies nouvelles montre que les émissions de CO2 des
biocarburants sont bien inférieures à celles des carburants d'origine
pétrolière.
|
Bilans
des émissions de Gaz à Effet de Serre pour différents types de carburants du
puits à la roue par kilomètre parcouru
|
Les biocarburants permettent d'enrayer la déprime des prix agricoles et à priori d'augmenter revenus et emplois agricoles au Nord comme au Sud de la planète.
Mais ils ne
pourront jamais remplacer les carburants fossiles. Il faut ainsi investir aussi
dans d'autres sources d'énergies et surtout dans la baisse de nos consommations
de carburants.
La production
actuelle de biocarburant est consommatrice d'énergie fossile (directement et
indirectement) et n'est pas sans impacts négatifs sur l'environnement. Il faut
donc travailler sur les itinéraires, la valorisation des coproduits mais aussi
des terres marginales, les combinaisons d'espèces, l'agroforesterie...
Leur développement
à grande échelle peut entraîner (directement ou indirectement) :
- la déforestation (carbone,
climat, biodiversité...) ;
- une flambée des prix des produits
alimentaires ;
- l'utilisation pour le Nord de
terres alimentaires du Sud. Il faudra prendre garde aux catastrophes
écologiques et humaines, aux conflits armées et/ou migrations massives.
(Source Dorin).
Conclusions
Les grandes
tendances pour l'avenir des biocarburants :
- Un développement de la première
génération à partir des ressources bon marché et écologiquement
viable ;
- Tous ces carburants seront
adaptés aux motorisations actuelles ou peu modifiées... hybrydes ;
- A partir de 2012-2020, l'arrivée
de biocarburants de 2ème génération écologiquement performants avec un
soutien politique fort.
Potentiel
des biocarburants
Complément:Les
carburants de demain
L'IFP
Energies nouvelles a mis en ligne une animation présentant
les caractéristiques des carburants de demain.
d. Le biogaz
Principe
La digestion
anaérobie (ou méthanisation / biogaz) est un procédé biologique de transformation,
en l'absence d'oxygène, de la matière organique (animale ou végétale) en
biogaz. Celui-ci est composé principalement de méthane (50 à 75 % en volume) et
de gaz carbonique.
Cette
digestion est réalisée en anaérobiose par une communauté microbienne complexe.
Elle se produit naturellement dans les marais, les lacs, les intestins des
animaux et de l'homme et de manière générale dans tous les écosystèmes où la
matière organique se trouve en condition anaérobie. Elle se produit également
spontanément dans les décharges contenant des déchets organiques. Le procédé de
méthanisation / biogaz industrielle se déroule en plusieurs étapes avec des
bactéries adaptées à chacune de ces étapes.
Les sources les plus courantes de biogaz proviennent des stockages de matières organiques volontaires ou involontaires :
- Les décharges : leur teneur en biogaz est
plus ou moins élevée en fonction de l'étanchéité du mode d'exploitation.
En France, la récupération du biogaz de décharge est obligatoire depuis de
nombreuses années.
- La collecte sélective des déchets
putrescibles :
elle permet une méthanisation plus rapide qu'en décharge en utilisant des
bioréacteurs spécifiques (digesteurs).
- Les boues des stations
d'épuration :
la méthanisation permet d'éliminer les composés organiques et permet à la
station d'être plus ou moins autonome en énergie.
- Les effluents d'élevages : la réglementation rend
obligatoire les équipements de stockage des effluents (lisier, fumier)
pour une capacité supérieure à 4 mois. Ce temps de stockage peut être mis
à profit pour la méthanisation des effluents. Il s'agit des déjections
animales mais aussi des autres déchets agricoles : résidus de culture et
d'ensilage, effluents de laiteries, retraits des marchés, gazon etc.
- Les effluents des industries
agroalimentaires :
ils peuvent aussi être méthanisés. Le but est principalement d'éviter le
rejet de matières organiques trop riches, et peut s'accompagner d'une
valorisation énergétique.
- Le fond des lacs et marais : le biogaz y est produit
naturellement par les sédiments organiques qui s'y accumulent.
Composition
du biogaz
Les
caractéristiques du biogaz
Le biogaz se
présente sous forme gazeuse (température et pression ambiante). Il contient
deux tiers de méthane et un tiers de gaz carbonique, mais sa composition varie
en fonction de la nature des déchets et des conditions de fermentation. La
présence de traces d'eau, d'azote, de soufre, d'oxygène, d'éléments
organo-halogénés rendent le biogaz moins pur et plus corrosif que le « gaz de
réseau » d'origine fossile. L'énergie du biogaz est issue du méthane. Son
pouvoir calorifique inférieur (PCI) est de 9,42 kWh/m3 (à
15°C et pression atmosphérique normale).
Les étapes
de la méthanisation
Schéma
de principe d'une usine de méthanisation
|
La
méthanisation s'effectue en plusieurs étapes. La matière "première"
est stockée dans une pré-fosse pour être ensuite incorporée directement dans
le digesteur. Le digesteur est une cuve (béton, acier ou autres matériaux),
généralement cylindrique. Enterré ou hors sol, il est hermétiquement clos,
isolé, brassé et chauffé. Le brassage permet d'éviter la formation de croûte
en surface et la sédimentation des matières. Après avoir séjourné 30 à 40
jours dans le digesteur, le substrat digéré est stocké dans une fosse en
béton ou en acier. La fosse de stockage devra être couverte pour conserver
l'azote et maximiser la récupération de méthane.
|
Complément:Les
différentes étapes "biochimiques" durant la méthanisation
Hydrolyse → acidogénèse → acétogénèse → méthanogénèse
Les
différentes étapes "biochimiques" durant la méthanisation
Quelles
voies de valorisation pour le biogaz ?
- La cogénération : la cogénération permet de
produire de l'électricité et de la chaleur. Le module de cogénération est
constitué d'un moteur entraînant un générateur de courant électrique
appelé alternateur. La chaleur, prélevée sur le système de refroidissement
du bloc-moteur et des fumées, est en partie (20 à 40 %) auto-consommée
pour chauffer le digesteur.
- La production d'eau chaude : il est possible de
valoriser le biogaz uniquement sous forme de chaleur si une forte demande
de chaleur à proximité du site est capable d'absorber la chaleur produite
toute l'année, ceci afin de limiter les coûts d'investissements (coût du
réseau de chaleur, déperditions, ...).
- Le gaz carburant : le biogaz doit être d'une
excellente qualité pour être valorisé comme carburant, et doit subir
plusieurs traitements. Il doit contenir 96 % de méthane et être dépourvu
d'eau, de soufre, d'organo-halogénés, de carbone et de métaux.
- Valorisation du digestat : le digestat est la
matière extraite en sortie du digesteur après fermentation et extraction
du biogaz. Possédant des propriétés intéressantes (plus fluide, plus
assimilable par les cultures, moins odorant...), il sera directement
utilisé comme fertilisant pour les terres agricoles.
Remarque:Ordres
de grandeur
La
méthanisation de 1 tonne de déchets fermentescibles à 40 % de matière sèche
permet d'obtenir 100 m3 de biogaz contenant 2/3 de méthane et
1/3 de gaz carbonique. Son PCI est équivalent à 0,065 tep soit 700 kWh
thermique. Cela permet une production d'électricité de 230 kWhélec.
Une tonne d'ordures ménagères produit 300 m3 de biogaz.
Exemple de
potentiel méthanogène de différentes matières
Complément:
L'utilisation
du biogaz du lac Kivu (grand lac d'Afrique), entrepris il y a plus de 40 ans,
est maintenant développée à grande
échelle.
Complément:Méthasim : outil de simulation technico-économique pour la méthanisation
Méthasim est
un logiciel de dimensionnement et de simulation de l'intérêt technico-
économique d'un projet de méthanisation à la ferme. Il a été conçu par
l'Institut du Porc (IFIP), l'Institut de l'élevage, Aile, Trame, la chambre
régionale d'agriculture de Bretagne, l'ITAVI, Solagro, et avec la collaboration
technique et scientifique du Cemagref de Rennes et de l'Ademe. Il permet
d'étudier la rentabilité d'un projet de méthanisation à la ferme et est
disponible en
ligne.
Exemple d'installation
Les
installations cogénération de biogaz permettent de produire à la fois de la
chaleur et de l'électricité. Par
exemple, pour une tonne de déchets méthanisés, on produit 170 kWh
électriques et 340 kWh thermiques.
Installation
au biogaz de Redange (Luxembourg)
Photographie
du site de Redange au Luxembourg
Mise en
service en 2003, la centrale de Redange a été initiée par 29 agriculteurs
des communes de Redange, Ell et Rambrough, dans un rayon de 6 km, qui se sont
regroupés dans une coopérative pour construire une usine de biogaz. Un réseau
local de chaleur de 750 m alimente la piscine publique, l'école secondaire et
la salle de sports avec l'énergie thermique de l'usine de biogaz.
Ressources :
- 3 500 UGB,
27 700 m3/an de lisier et 14 300 tonnes/an de fumier
- 70 ha de cultures énergétiques
- Déchets organiques : 4 000
tonnes/an
Dimensionnement :
- Trois préfosses pour préchauffer
le lisier des fermes avant de passer dans le digesteur
- Prédigesteur horizontal de type
EUCO de 260 m3 à une temperature de 55°C. Le temps de
retention est au moins 24 heures
- Trois digesteurs de 1 000 m3 et
3 post-digesteurs de 1 000 m3 également
- Deux cuves de stockage de 1 600 m3
Stockage du digestat :
15 cuves
décentralisées sur 13 sites pour un total de 33 000 m3
Investissement :
- Coût : 5,1 millions € (unité
de méthanisation et réseau de chaleur)
- Subventions : 57% Ministère de
l'Agriculture / Union Européenne au travers du réseau LSDN (Local
Sustainable Development Network)
- 4 000 € des membres de la
coopérative
- Financement par les banques
Revenu :
- Prix de vente de l'électricité :
0,1023 €/kWh
- Prix de vente de la chaleur :
0,03€/kWh
Puissance :
- Module de cogénération de 700 kWe
- Chaudière de 1 400 kW
Production d'énergie :
- Production de biogaz : en
moyenne 7 000 m3/jour à une concentration moyenne en méthane de
55%
- Énergie électrique produite : 4
308 000 kWh/an
- Énergie calorifique totale : 6
300 000 kWh/an dont 40 % auto-consommée par le processus
- Énergie calorifique utilisable :
3 780 000 kWh/an
Complément:Exemples sur le site de l'ADEME
L'ADEME
présente des exemples d'installation de production de biogaz (lien).
Les coûts et les dispositifs d'aide
Les coûts
d'investissements
Les ordres de
grandeur en termes de coût à l'investissement varient notamment selon les
déchets utilisés, les contraintes territoriales du lieu de production, le mode
de valorisation du biogaz et la puissance de l'installation. Le coût à
l'investissement est généralement compris entre 4 000 et 9 000 € par kW
électrique installé pour une valorisation du biogaz en cogénération pour des
projets agricoles individuels ou collectifs.
Selon la
capacité installée :
- 8000 à 9000 €/kWe installé pour
des projets inférieurs à 300 kW ;
- 7000 à 8000 €/kWe installé pour
une unité de 300 kW ;
- 5000 à 6000 €/kWe installé pour
une installation de 500 kW ;
- 4000 à 5000 €/kWe installé pour
une unité d'1 MW.
Exemples de
coûts :
- Projet du GAEC de l'Oudet
(Ardennes) : 30 kW, 200 000 € d'investissement, une partie
d'auto-construction ;
- Projet du GAEC du Château
(Ardennes) : 70 kW, 370 000 € d'investissement pour la partie biogaz et
600 000 euros avec la mise aux normes ;
- Projet de la SCEA des Trois
chênes (Nord) : 250 kW, 800 000 € d'investissement.
(Source Ministère
de l'agriculture et Arer).
Les dispositifs d'aide
Le dispositif
de soutien à la filière biogaz repose sur deux volets complémentaires ayant
pour objectif d'assurer la rentabilité des installations : des aides à
l'investissement initial, et des tarifs d'achat garantis pour l'électricité et
le biogaz injecté. Le plan EMAA et
le Plan National Biogaz viennent désormais compléter ce dispositif, pour encore
accélérer le développement de cette énergie renouvelable, locale et créatrice
d'emplois.
Les aides à l'investissement (représentent entre 20 et 30% des coûts d'investissement environ actuellement, selon les projets et les conditions locales) :
- des aides territoriales sont
octroyées par l'Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie
(ADEME) au titre du Fonds déchets, et au titre du Fonds chaleur (pour
l'injection ou la valorisation du biogaz sous forme de chaleur) ;
- des aides à l'investissement sont
également octroyées par les collectivités territoriales, les Conseils
Généraux et Conseils Régionaux, les fonds FEDER et FEADER, ainsi que par
le Ministère de l'Agriculture dans le cadre du Plan de Performance
Énergétique des exploitations agricoles.
Les tarifs d'achat, garantis sur une durée de 15 ans :
- Pour le biogaz, la valorisation
la plus fréquente est la production de chaleur et d'électricité par
cogénération en raison de la mise en place en 2006 d'un mécanisme
d'obligation d'achat de l'électricité selon un tarif subventionné qui a
été réévalué par l'arrêté du 19 mai 2011. Il s'échelonne, selon
l'efficacité énergétique, la puissance électrique installée et la
proportion d'effluents d'élevage valorisés, entre 11,19 et 19,97 centimes
d'euros / kWh.
- Il existe depuis le 23 novembre
2011 un tarif d'achat pour le biométhane injecté dans les réseaux de gaz
naturel. Ce tarif d'achat du biométhane injecté comprend un tarif de base
compris entre 6,4 et 9,5 centimes d'euros / kWh selon la taille de
l'installation, auquel peut s'ajouter une prime calculée en fonction de la
nature des matières traitées par méthanisation. Cette prime est comprise
entre 2 et 3 centimes d'euros/kWh si les intrants sont composés
exclusivement de déchets ou de produits issus de l'agriculture ou de
l'agro-industrie. Le tarif d'injection s'échelonne donc de 8,4 à 12,5
centimes d'euros / kWh.
- Un nouveau dispositif dit «
double valorisation » vient d'être mis en place, qui permet aux
producteurs de biogaz de valoriser simultanément leur production sous
forme d'électricité et sous forme de biométhane injecté dans les réseaux
de gaz naturel, en leur accordant le double bénéfice des dispositifs de
soutien tarifaires existants pour la production d'électricité à partir de
biogaz et pour la production de biométhane injecté.
(Source Ministère
de l'agriculture).
Tarif
d'obligation d'achat du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturels
Tarif
d'obligation d'achat de l'électricité applicable aux installations de
méthanisation
Le marché
Union
Européenne à 27
La
valorisation énergétique du biogaz progresse dans l'Union européenne tant sur
le plan de la production d'électricité que sur celui de la consommation de
chaleur biogaz. La diminution de la production d'énergie primaire en 2011 n'est
pas significative et s'explique par un changement de méthodologie de
l'Allemagne, le plus grand pays producteur de biogaz.
Derrière ce
pays, de nouveaux marchés sont en train d'émerger, mais la crise économique et
les contraintes réglementaires ne favorisent pas leur expansion.
En retirant
l'Allemagne des statistiques, on peut s'apercevoir que la croissance de la
production d'énergie primaire est restée soutenue dans les autres pays de
l'Union européenne (+19,3 % entre 2010 et 2011), soit un gain de 812 ktep.
Dans l'ensemble des pays de l'Union européenne (Allemagne incluse), la répartition des différents types de gisements biogaz est toujours clairement à l'avantage des unités spécialement conçues pour la valorisation énergétique (réunies sous l'appellation “autres biogaz”). Avec une part de 56,7 % en 2011, elle devance largement le biogaz de décharge (31,3 %) et le gisement des stations d'épuration (12 %). Le niveau de développement de ces gisements est différent selon les pays. Au Royaume-Uni, en France, en Italie et en Espagne, le biogaz de décharge demeure le principal gisement. Celui des “autres biogaz” est le mieux représenté en Allemagne, aux Pays-Bas, en République tchèque, en Autriche, en Belgique, au Danemark, au Luxembourg et dans bon nombre de pays d'Europe de l'Est.
La production
d'électricité et la production de chaleur, fonctionnant ou non en cogénération,
sont les deux principales voies de valorisation du biogaz dans l'Union
européenne. Mais l'augmentation de la production de l'énergie primaire profite
davantage à la production d'électricité. Entre 2010 et 2011, l'électricité
biogaz a en effet augmenté de 18,2 % pour atteindre 35,9 TWh.
Production
d'énergie primaire de biogaz de l'Union européenne en 2010 et 2011(en ktep) -
Production brute d'électricité à partir de biogaz de l'Union européenne en 2010
et 2011 (en GWh)
Entre 2010 et
2011, la vente de la chaleur biogaz à des usines ou à des réseaux de chaleur a
augmenté de 16 %. La plus grande part de la chaleur produite est consommée
directement sur le site pour le séchage des boues, le chauffage des bâtiments
et pour maintenir le digesteur à une température optimale.
Production
de chaleur à partir de biogaz de l'Union européenne en 2010 et 2011* (en ktep)
dans le secteur de la transformation**
Une troisième
voie de valorisation se met en place dans l'Union européenne, l'injection du
biométhane (biogaz épuré sans CO2) dans le réseau de gaz naturel.
Production
d'énergie primaire de biogaz dans les pays de l'Union européenne à la fin 2011
(en ktep) avec les parts respectives de chaque filière
Le marché de
la méthanisation en Europe reste encore très dépendant du marché allemand, qui
montre des signes d'essoufflement. La plupart des industriels présents
cherchent à développer leur activité vers les marchés européens les plus
prometteurs (Royaume-Uni, Italie, Pologne, France et République tchèque). Mais
les niveaux de développement actuels de ceux-ci ne pourront pas intégralement
compenser la baisse du marché allemand.
En écho à la
nouvelle législation allemande, les fabricants d'équipements cherchent à
développer des unités de méthanisation de taille plus modeste (75 kW). Ils
développent donc de nouveaux process et de nouveaux équipements basés sur une
proportion importante de lisiers à plus faible pouvoir méthanogène. Une autre
tendance du marché est le développement des activités liées à l'augmentation de
la puissance des capacités existantes (repowering). Enfin, de plus en plus de
fabricants font le choix d'investir dans leurs propres unités de méthanisation
et ainsi de devenir exploitants afin de réduire leur dépendance vis-à-vis du
marché de la construction.
Entreprises
représentatives du secteur de la méthanisation en Europe
France
Encore peu
développée en France, la méthanisation dispose d'un potentiel économique et
industriel important notamment pour les agriculteurs. La méthanisation est une
opportunité pour construire une agriculture respectueuse de l'environnement
mais c'est également une solution pour résoudre le problème de traitement des
déchets.
Le secteur
agricole en France contribue pour une part importante à l'économie du pays. Une
étude récente de l'AEBIOM, Association Européenne pour la Biomasse montre que
la France détient en fait le plus gros potentiel de biogaz d'Europe, mais est,
à l'opposé, la plus mal équipée en installations spécialisées.
A l'heure
actuelle, la méthanisation apporte une faible contribution aux énergies
renouvelables en France. En effet la production d'énergie (électricité, chaleur
ou biométhane) produite par digestion anaérobie représente 0,1% de la
production d'énergie primaire. Cependant, derrière cette réalité globale, la
production d'électricité issue du biogaz a plus que doublé durant ces dernières
années.
Vingt
installations de biogaz sont basées sur l'exploitation des décharges, 10 sur
les ordures ménagères, 60 sont des installations de traitement des eaux usées
urbaines, 80 sont des installations de traitement des eaux usées industrielles
et agro-industrielles, et 48 sont des unités de méthanisation agricole et
territoriale. Toutes revendent leur électricité au réseau national.
Le nombre
d'installations agro-alimentaires et agricoles est très faible compte tenu du
potentiel théorique de la France, mais la dynamique est relativement forte. Fin
2011, 35 installations étaient en construction, de puissance moyenne 470kW, à
comparer avec la moyenne actuelle de 200kW.
(Sources : BiogazEurope et
Club Biogaz ATEE).
Pour aller
plus loin...
Pour
approfondir le sujet sur le biogaz, consulter :
- Dossier de l'Ademe, "La Méthanisation"
- Revue Ademe et Vous, lien.
- FranceAgriMer : La
méthanisation : état des lieux et perspectives de développement, lien.
- Fiche "la biomasse énergie" (2015)
Conclusion
La filière
biomasse solide est en pleine expansion. On assiste à un développement de la
cogénération, et a un engouement pour les combustibles tels que les granulés
bois. Le marché des centrales à biomasse et des appareils de chauffage au bois
est également porteur. Mais la structuration de la filière reste nécessaire,
notamment au niveau de l'approvisionnement en bois. La France a connu un investissement
massif dans la filière biocarburants ces dernières années.
L'industriel
du biodiesel et du bioéthanol sont en pleine expansion. Des obligations
d'incorporation et des exemptions fiscales ont été initiées par les pouvoirs
publics. La filière doit prendre en compte les problématiques liées à
l'environnement et se tourner vers les sources de biocarburants qui ne rentrent
pas en compétition avec la filière alimentaire (2e et 3e générations).
La filière
biogaz bénéficie d'une bonne croissance et d'une législation favorable.
L'amélioration de la qualité du biogaz (hausse de la teneur en méthane) est
nécessaire pour faciliter sa valorisation.